lundi 14 novembre 2011

Aliaa Elmahdy, féministe ou pauvre fille ?

Aliaa Elmahdy, une activiste féministe, a posté des photos d’elle nue sur son blog. Par là, elle entend dénoncer « une société de violence, de racisme, de sexisme, de harcèlement sexuel et d’hypocrisie ». Cela a suscité des réactions bien sûr, et c’était voulu. Certains estiment qu’elle « objective » son corps. On la traite même de pauvre fille. D’autres saluent son courage J’avais déjà parlé de long en large de ce sujet ici. Peut-on se montrer pour se montrer féministe ?




Cette photo est féministe de par sa nature « choquante ». Cette photo est féministe parce qu’elle crée le débat. Qui se pose encore des questions aujourd’hui en passant devant des publicités usant du porno-chic à tout va, ou par des images pornographiques de plus en plus violentes qui pullulent sur Internet. Plus grand monde. Est-ce qu’on fait beaucoup d'articles pour ce genre d'images ? :



@http://www.finemaree.com/

@http://lafemmeobjetmarketing.blog-idrac.com/


@http://luxezmoi.over-blog.com/


Pas beaucoup d’articles non. On ne traite pas de « pauvres filles » les mannequins de ces photos. Par contre cette photo d'Aliaa Elmahdy, sa nudité offerte, perturbe. Ce serait même contraire à ses revendications féministes.

Attention. Les féministes ne veulent pas « cacher » le corps de la femme, bien au contraire. Le combat féministe a tout fait pour libérer ce corps féminin, si effrayant. Il a fallu le libérer du mariage, du corset, de la jupe longe qui empêchait les mouvements, le libérer de l’exploitation sexuelle, d’une grossesse non désirée, et même le libérer du soutien-gorge dans les années 70.



@http://blog.plafonddeverre.fr/

Ce que dénonce certaines féministes, c’est bien l’utilisation marchande du corps de la femme, telle que pratiquée par la pornographie, la publicité et la prostitution. Peut-on considérer qu’un corps est un bien comme un autre ? Qu’on le vend, l’utilise, le négocie comme le dernier écran plat mis sur le marché. Une marchandise, ça se marchande. C’est quelque chose qu’on vend. C’est quelque chose pour laquelle on est payé. Combien gagnera Aliaa Elmahdy pour cette « marchandisation » et cette « objectivation » dénoncée de son corps ? A part quelques insultes, rien. Oui, cette photo est féministe. Comme les revendications qui vont avec. Comme les féministes du mouvement FEMEN, à qui on reproche de ne pas cacher ce sein qu’on ne saurait voir. Quelles revendications peut-on identifier dans ces photos qu’on ne dénonce pas :



@http://www.codornew.com/


@http://ulfablabla.free.fr/



@http://www.comanalysis.ch/

Je n’ai pas encore trouvé. Une pauvre fille Aliaa, vraiment ? Regardez-là mieux :



Un regard franc, un regard direct. Un regard dans lequel on peut identifier de la tristesse, aussi. Et comme un ras-le-bol. Aliaa nous dit « assez », Aliaa nous dit « je suis libre et, oui, j’ai un corps ». Dans ce corps exposé nu, on peut identifier de la liberté. Pas de regard de connivence, pas de bouche entrouverte, pas de poses suggestives, pas de retouches photoshop, pas de produits à vendre. Cette photo n’est même pas construite pour exciter. Elle montre un corps de femme, tel qu’il est.

Je ne pense pas que toute femme pour être libre doit faire la même chose. Aliaa, pour « sortir » du carcan d’une morale qui opprime son corps, l’a fait. Sur son blog, elle ne pose pas seule d’ailleurs, il y a même des hommes. D’autres ne ressentiront pas ce besoin. Mais qu’on ne nous fasse pas croire que quand une photo de femme nue (ou à moitié nue ou avec des poses suggestives) est destinée à la publicité ou à la pornographie, c’est normal, et que quand une femme le fait pour elle, pour dénoncer des choses, parfaitement dénonçables, c’est mal. Les Egyptiens ne vivent pas dans des sociétés hyper-sexualisées comme els nôtres, gageons que le débat sera beaucoup plus vif là-bas (et encore une fois, c’est le but). Mais qu’ici, on réfléchisse à deux fois avant de penser qu’on est face à une "pauvre fille". La peur du corps féminin n’a pas fini de faire parler d’elle.

Sur presque le même thème, on (et même des femmes et mêmes des féministes) m’a reproché d’avoir participé à la Marche des Salopes. On m’a demandé si j’étais salope ou féministe, on m'a dit qu'il faudrait choisir. Voilà la réponse : jamais en participant à la Marche des Salopes, je me suis sentie « salope » une seule seconde. C’était bien le but d’ailleurs. Rappelez que les femmes ont le droit de porter ce qu’elles veulent, sans qu’on les traite de « salope ». Bien sûr qu’on ne se considère pas salope en y participant. L’appellation « Marche des Salopes » est ironique. On reprend, pour le dénoncer, pour montrer à quel point il est absurde, le terme utilisé contre les femmes qui s’habillent comme elles le veulent, en jupe notamment. Si on estime qu’en participant à cette marche, on « devient » des salopes, alors c’est réagir comme le pire des machos. Et c’est triste de devoir expliquer cela.



@http://whatmenthinkofwomen.blogspot.com/

2 commentaires:

  1. D'accord avec ton article et bravo à Aliaa. Just do it ! http://lenalarrive.blogspot.com
    Hélène Larrive

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  2. Un jeune homme qui approuve votre article.
    J'avais besoin de chercher sur la Toile des articles comme celui-là, marre de la voir se faire traiter de tous les noms...
    Anthony.

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