mardi 7 février 2012

Construire un métier plus féminin


La campagne « Femmes dans la construction » se lance pour changer le regard sur ce secteur. L’ASBL Construtec Wallonie, en collaboration avec la Région wallonne, souhaite plus de femmes comme ouvrières qualifiées et sensibilise les jeunes en formation et les entreprises.




http://www.ps.be



    Le chantier est-il un lieu réservé aux hommes ? La campagne de sensibilisation « Femmes dans la construction », inaugurée ce mardi 7 février, s’attaque à cette idée. L’objectif est de promouvoir la présence des femmes dans le secteur de la construction. L’ASBL Construtec Wallonie est en charge de cette initiative soutenue par la Région wallonne. L’association, où travaillent d’ailleurs de nombreuses femmes, est une structure au service des entreprises et de leur personnel. Elle s’axe sur deux buts : mettre en œuvre et promouvoir des formations de perfectionnement dans les nouvelles technologies, et lancer des actions provenant d’une concertation entre les partenaires sociaux, comme c’est le cas ici. Au travers d’une série d’affiches, de brochures, d’un groupe Facebook mais aussi de l’envoi de « coachs » sectoriel. L’objectif est de convaincre les personnes en formation comme les entreprises du bâtiment que les femmes ont aussi leur place sur un chantier.                

Distinguer une ouvrière sous les casques de protection est aujourd’hui presque mission impossible. En effet, en Belgique, seul 0,8% des effectifs sur chantier sont des femmes. Et malgré une progression depuis 2007 où ce taux n’était que de 0,5%, il reste encore beaucoup à faire. Agnès Marlier est la responsable pour Construtec de la campagne « Femmes dans la construction ». Elle précise que « cette campagne fait partie d’une action existante depuis  mai 2009. Nous n’avons pas prévu de date de clôture pour l’instant car nous visons une sensibilisation sur le long-terme. Nous espérons que le taux de femmes dans le secteur de la construction dépassera le seuil symbolique du 1% cette année mais nous aimerions surtout avoir un nombre à deux chiffres d’ici quatre à cinq ans. » Une situation d’autant plus étonnante que ce domaine professionnel connaît une grave pénurie de main d’œuvre qualifiée dans notre pays.

Ouvrier, un métier d’homme ?

Les stéréotypes propres à la construction expliquent en grande partie ce paradoxe. Agnès Marlier connaît bien cette problématique. « Il y a déjà une discrimination à l’embauche par les employeurs qui pensent que les femmes ne sont pas assez fortes ou assez techniques pour travailler sur un chantier. Ou encore qu’elles poseront des problèmes de disponibilité à cause d’éventuels enfants. Un point plus précis concerne l’installation de sanitaires pour les femmes sur les chantiers. Trop couteux selon certaines entreprises, qui n’en installent pas du tout, même pour les hommes alors que c’est illégal. » Mais ces clichés existent également dans l’autre sens, rebutant les femmes lors du choix de cette orientation professionnelle. Celles-ci redoutent le jugement des entreprises par rapport aux stéréotypes cités ci-dessus et hésitent à postuler ou à se former comme ouvrière qualifiée. Les chantiers eux-mêmes sont victimes d’une série d’idées reçues concernant la propreté ou le machisme ambiant. L’actuelle atmosphère ne donnerait donc pas vraiment envie aux femmes d’intégrer ce secteur professionnel.

Déjà de vives réactions

La campagne a bien entendu suscité des réactions du public. Annoncée par les médias depuis seulement une journée, quelques interrogations reviennent constamment. Les femmes prendraient-elles la place d’autres hommes ou de chômeurs ? Mme Marlier rétorque que « chacun doit trouver le métier qui lui plaît et les entreprises pleurent pour avoir de la main d’œuvre qualifiée ». Isabelle Crucifix partage ce point de vue. Cette sanitariste de vingt-sept ans installe des appareils sanitaires depuis plus de quatre ans. « Je suis sur un chantier pour faire mon boulot. Je m’entends super bien avec certains collègues mais je ne fais pas copain-copine. Cependant, je n’ai jamais eu de problèmes avec les eux ou les autres corps de métier. Ni avec les patrons, les clients ou les architectes d’ailleurs. Ils sont là pour aider et je n’ai jamais vécu de situation discriminante mais il faut dire que je travaille pour mon père. La situation sur le terrain a changé. Avant les machines et les matériaux étaient plus lourds, ce qui réservait en quelque sorte la construction aux hommes. » Sur les chantiers, en plus de l’absence de femmes, les clichés sexistes ont encore la peau dure. Presque autant que le mur en béton que cette campagne tente d’abattre.


Un article de Cédric Dautinger

dimanche 5 février 2012

Dur dur d’être infidèle

Polémique autour des affiches promotionnelles du film français "Les Infidèles", censurées par l’Autorité de régulation professionnelle de la publicité car présentant "une image dégradante de la femme". Certains s’insurgent donc. Cette censure serait abusive. Analyse.


http://www.lunettesde.com/

http://www.francesoir.fr/

Première remarque : où sont les visages féminins ? Si les corps sont plus que mis en évidence dans au moins deux de ces affiches (merci photoshop en passant), le visage est le grand absent. C'est vrai, le visage ce n'est pas important. Du tout. N'importe qui peut vivre sans tête. Ce n'est pas comme si la tête et le visage étaient le siège des émotions. Ou du cerveau. Il faut croire que ce n'est pas ça, l'important. 

Dans ces affiches, le problème, ce n'est pas de voir deux jambes. Je n'ai franchement rien contre les jupes, j'en porte tous les jours. Le problème, c'est de voir deux jambes comme ça. Sans corps, tenues comme un vulgaire balais. Comme deux choses. Le problème, ce n'est pas de voir une fellation. Je n'ai franchement rien contre les fellations. Le problème, c'est de mimer une fellation et de la placarder en format A1 dans un espace public, la rue. 

On l'a bien compris, l'infidélité masculine, c'est chouette. C'est l'éclate. Mentir à sa femme, c'est chouette, c'est l'éclate. Et traiter les femmes comme des objets, c'est chouette. 



C'est l'éclate. 

Ils sont bien habillés, souriant, presque sympathiques. On peut aussi remarquer que les affiches mettent en scène deux hommes en costume et des femmes en parfaites secrétaires. Dans le monde du travail, comme ailleurs, la femme est encore et toujours "en-dessous". 


Le film n'est pas encore sorti, je vous l'accorde. Cependant, il suffit de voir les bandes-annonces :








(Moi en tout cas j'ai compris que je ne risquais pas d'aller le voir au cinéma, donner de l'argent à des films comme ça, non merci, je risque plutôt de le télécharger illégalement sur un de nombreux sites qui remplacent Megaupload, pour rire "un bon coup" -bonjour les agents du FBI si vous passez par ici- ).

On présente le film comme différentes séquences humoristiques sur l'infidélité masculine. Ce qu'on oublie de dire, c'est quelle image de la femme y est présentée. Les femmes n'ont pas d'autres choix dans la vie que cette alternative :  mère ou pute, mariées pigeonnées ou maîtresses pigeonnées. La femme qu'on désire est une pute, la femme mariée (est-ce qu'on peut la désirer? ), une gentille idiote à qui on peut raconter n'importe quoi. L'image des hommes n'y est pas soignée non plus. Infidèles, incapables de contrôler leurs pulsions (ou leur pénis), éternels adolescents farceurs qui ne peuvent considérer les femmes que comme des oiseaux sans têtes. A vomir.  N'oublions pas non plus l'infidélité féminine. Oui oui je vous assure. Une femme peut avoir des désirs sexuels. Parfois vers d'autres personnes que son mari (vous tenez le coup?). On ne peut pas en rire ? C'est moins l'éclate ? C'est tabou ? On dirait. 

Ce n'est pas l'infidélité, ou la fellation, ou les jambes nues qu'il faut dénoncer. Ce qu'il faut dénoncer, c'est ce que sous-entendent ces affiches.Ce qu'il faut dénoncer, c'est une vision réductrice et fausse. On peut rire de l'infidélité, mais on peut aussi y réfléchir et apporter une réflexion critique. Il faut espérer que cela sera le cas dans ce film, au risque de rester sur l'image de deux hommes se moquant de la possibilité de ne pas tromper leur femme.


http://www.crise-economique.net/




Censure ou pas censure, je ne suis pas certaine que la question se trouve là. Je ne suis même pas sûre qu'il fallait censurer. Le simple fait qu'il existe une polémique, qu'il y ait des "pour" et des "contre" et que l'on réfléchisse sur cette affiche me suffit amplement. Il y a peut-être quelques années, une telle affiche serait passée sans créer un débat de société.

Je vous laisse réfléchir sur ce que m'a dit une publicitaire qui travaille au JEP et que j'ai interviewé récemment : "Quand on décide de censurer une campagne de publicité, ça ne sert parfois à rien car elle est alors reprise par tous les médias et montrée à tout le monde. Parfois, certains publicitaires comptent là-dessus pour créer le buzz. Pour eux, que la publicité plaise ou pas, ce n'est pas l'important, il faut qu'elle soit vue".

A lire :

http://www.huffingtonpost.fr/eliette-abecassis/les-infideles-ou-les-infe_b_1252089.html?ref=fr-culture

http://m.marianne2.fr/Affiche-des-Infideles-pas-de-quoi-en-faire-toute-une-pipe-_a215163.html